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Inclusion

Inclusion sociale des Personnes handicapées, l’histoire inspirante de Délali et de Manafi

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Delali au cours dune seance du Comite de developpement inclusif du village

De Bougou (au Bénin) à Djonougbé (au Togo), nous les avons rencontrés à des occasions différentes.  Voici l’histoire croisées de deux jeunes gens qui ont pu surmonter des difficultés dues à leur handicap grâce au soutien de leurs proches, au soutien de leur communauté respective et à l’appui institutionnel.

Pour nous visiteurs, elle est perçue un peu comme une star. Elle est la personne qu’il faut impliquer dans les activités du village afin de garantir un aspect d’inclusion sociale. Dans la communauté villageoise de Djonougbé – un village ifè (une variante du yoruba) du centre du Togo – elle considérable. Mais surtout considérée comme un modèle de réussite. Pour nous aussi, elle l’est.

« Je voudrais vous montrer que l’aide que vous m’avez apportée m’a permis de bien mener mon activité de vente et que aujourd’hui j’ai pu construire le bâtiment que vous voyez là. C’est ma chambre, là où j’habite. La douche est derrière là-bas », nous explique-t-elle, nous invitant à faire le tour. Devant nous se dresse effectivement un bâtiment moyen d’environ deux pièces, encore neuve par le crépissage et la toiture, comparativement aux autres bâtiments situés juste à côté. Délali est contente, nous la sentons fière. Mais nous aussi pour elle.

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Paralysée des membres inférieurs, la jeune dame avait beaucoup de difficultés de mobilité. Et surtout, elle devait aussi affronter les regards de ces concitoyens empreints de pitié et de non considération. Elle a donc été identifiée et soutenue par le partenaire local, l’ONG Odjougbo basé à Attakpamé (commune Ogou 1, dans la région des Plateaux), par le fonds de la Fondation Liliane qu’administre dans le pays la Fédération Togolaise des Associations de Personnes Handicapées (FETAPH). Le soutien a d’abord été sur le plan sanitaire. Une chirurgie aurait même été envisagée, mais n’a pu se faire. Puis le soutien s’est mué en l’appui d’une Activité génératrice de revenus.  C’est ainsi que Délali a entrepris de vendre les unités et autres forfaits GSM y compris les services financiers mobile (appelé TMoney au Togo). Mais elle a dû stopper les services financiers car elle a été cambriolée. A cela, elle a ajouté le petit commerce de divers en s’approvisionnant au marché voisin. Chez elle, c’est aujourd’hui le point de passage obligé lorsqu’on a besoin d’un certain nombre de services de proximité : achat d’unités et forfaits internet GSM, recharge de batterie de téléphone GSM, etc.

C’est pour elle ou encore à cause d’elle, selon les villageois, que les rampes d’accès au niveau des lieux publics stratégiques du village ont été réalisées afin de lui permettre de participer aux activités communautaires avec son fauteuil roulant. En effet, le Comité de Développement Inclusif (CDI) du village a réalisé une rampe (terrassement) respectivement à l’entrée du salon du chef de village, à l’entrée de la cours de l’école primaire du village ainsi que pour accéder au bâtiment central de ladite école avec moins de 8% de pente. Ces trois endroits ont un point commun : ils abritent régulièrement des réunions et des séances de concertation relatives à des préoccupations de développement du village et auxquels Délali participe activement. D’ailleurs, elle est la trésorière du CDI. « Quand l’appui à Delali a pris fin car elle a atteint l’âge limite, nous avons réfléchis que nous ne pouvons pas la laisser comme ça. Alors nous avons suscité la mise en place du CDI afin de préparer le village à prendre la relève », explique l’un des agents de l’ONG Odjougbo chargés de l’appui et de l’accompagnement, assurant le suivi des activités communautaires.  Le CDI a ainsi endossé son rôle, menant surtout des activités de sensibilisation sur le handicap et l’inclusion des personnes handicapées et aussi en faisant de petites mais significatives réalisations telles que les rampes et récemment la construction d’un hangar dans la cour de l’école primaire pour, ont-il indiqué, accueillir les petits enfants d’âge préscolaire du village.

En tout cas, Délali semble avoir trouvé sa place dans le corps social de son village. Et elle dit en mesurer toute la portée, surtout que ces concitoyens ainsi que les jeunes la considèrent comme un modèle.

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Manafi, l’alter ego béninois

L’histoire de Délali dans le village de Djonougbé au centre du Togo ressemble étrangement à celle de Manafi dans le village de Bougou (dans la commune de Djougou) au nord du Bénin. Celui-ci, il y a plusieurs années, avait répondu à un défi que certains de ces camarades d’école avaient lancé, à la sortie des classes : sauter en contre-bas dans un lac, une sorte de chute d’eau, comme il y en a beaucoup dans les rochers du nord. Sauf qu’au lieu de glisser dans l’eau tel une baleine, Manafi atterri de la tête sur un roc au fond de l’eau. Cet accident le cloua depuis lors dans un fauteuil roulant, pratiquement tétraplégique. L’aide la Fondation Liliane lui permit de supporter les soins en kinésithérapie et ensuite de lancer une activité génératrice de revenus consistant en un petit commerce.

Je l’ai rencontré la dernière fois en 2018 et il me confiait avoir retrouvé – par une longue persévérance et aidé de sa mère – sa  place dans la dynamique sociale de son village. Une dynamique qui a suffisamment intégré sa personne au point où, quand il arrive qu’il ait des ennuis de santé et que sa boutique devrait rester fermée, certains villageois viennent lui proposer de lui garder la boutique ouverte.

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Le kiosque « Chez Manaf » est connu à Bougou au bord de la grande voie. Ce kiosque est reconnu comme un point de ralliement de tout le village pour s’approvisionner en toute sorte de denrées de première nécessité ainsi que les produits GSM. « J’ai pu installer par moi-même quelques panneaux solaires, ce qui fait que quand il y a coupure d’électricité dans le village, c’est seulement chez moi que les gens arrivent à recharger la batterie de leur portable », me racontait-il en 2018. Aussi, était-ce seulement chez lui qu’il était possible de récupérer les puces (carte SIM) perdues ou défectueuses.

Après le décès de son père, Manafi a réussi à devenir le « garçon » de la famille en prenant sur lui les besoins de sa mère et de ses frères et sœurs. Un rôle social qu’il n’est souvent pas évident pour les personnes handicapées de jouer, tant les barrières de toutes sortent sont nombreuses dans la société.

L’histoire de Délali au Togo et celle de Manafi au Bénin sont des cas d’école – des cas de réussite parmi tant d’autres encore anonymes – qui démontrent aux acteurs sociaux, aux acteurs institutionnels et politiques que l’autonomisation et l’inclusion sociale des personnes handicapées est un droit humain et est réalisable, pour peu que l’on s’y penche sérieusement, que l’on y travaille en synergie d’acteurs, que l’on y investisse.

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Bernard HOUEHOUNDE (collaboration)

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